Ne plus laisser les usagers de la SNCB en « plan »!
Vanessa MATZ
Dans le cadre de la préparation de son futur plan de transport, la SNCB vient de clôturer son « Roadshow », un tour de consultation dans chaque province du Royaume.
Les citoyens démocrates humanistes (cdH) se réjouissent que la démarche privilégiée par l’entreprise publique se veut participative. Consulter et réfléchir, c’est bien. Mais le cdH exige du concret pour que les usagers bénéficient réellement d’un meilleur service de l’opérateur de transport !
Vanessa MATZ, députée fédérale cdH et Gianni Tabbone, président de Navetteurs.be et militant au cdH reviennent sur les enjeux du rail en Belgique, qui dépassent largement le plan de transport de la SNCB et identifient plusieurs grandes priorités :1. Nous avons besoin d’un plan de mobilité « as service » tourné vers les usagers ! Cela passe par un plan de transport public national !
- INFRABEL et SNCB doivent travailler main dans la main pour élaborer un plan de mobilité national ! INFRABEL et la SNCB sont trop tournés sur eux-mêmes et se rejettent mutuellement les responsabilités des problèmes rencontrés sur le réseau. Par exemple, quand vous ratez une correspondance car le train n’a pas attendu celui dans lequel vous vous trouvez, c’est en général parce qu’INFRABEL en a donné l’ordre à la SNCB, sans se soucier des personnes qui devront attendre parfois une heure pour reprendre un autre train. Quand deux trains en direction de Liège sont bloqués en gare du Nord et que la SNCB est incapable de vous dire lequel partira en premier et d’orienter les voyageurs en conséquence, c’est parce qu’il y a un souci de communication entre les opérateurs. Les retards et les annulations de train dépendent souvent des avaries sur le réseau, pas uniquement du matériel roulant ! Or, pour en réduire le risque, il faut qu’INFRABEL se modernise et dispose de moyens suffisants !
Pour faire rouler des trains plus tôt ou plus tard, il faut se coordonner avec le transport de marchandise. Cela passe encore et toujours par des décisions d’INFRABEL. La SNCB peut s’engager sur de magnifiques promesses. Mais si INFRABEL n’agit pas en conséquence, nous n’aurons rien de concret. - La SNCB doit aussi collaborer avec les autres opérateurs de transport public (TEC, DE LIJN et STIB), tous les pouvoirs publics et certains opérateurs privés : Il faut éviter de construire un plan de transport SNCB circonscrit aux seules missions de l’opérateur historique. Nous devons prendre en compte tous les maillons de la chaine de services qui garantiront aux voyageurs un déplacement efficace et de qualité d’un point A à un point B : accessibilité d’une gare ou d’un arrêt, en voiture, en bus, à vélo ou à pied, présence de parkings suffisants (pour voitures ou vélos), horaires cohérents entre les bus, les trams et les trains, aménagement de gares « de courtes distances » permettant d’accéder aux quais sans devoir marcher des kilomètres depuis les quais des bus ou les parkings, bonne couverture 4G sur l’ensemble des lignes, mise à disposition de voitures partagées, de vélo ou d’engins électriques (gyropodes, trottinettes, segway, monowheel…) en libre-service, intégration tarifaire quel que soit le mode de transport ou le service… Tout cela ne peut se construire dans le seul périmètre des compétences de la SNCB ! A terme, cette coordination devrait aussi se faire sur les plans d’investissements. Le Directeur général de De Lijn estimait, lors d’auditions au Sénat, que les sociétés de transport régional et fédéral devraient se concerter avant d’établir leur plan d’investissement.
2. Bénéficier d’un train par heure au minimum dans chaque sens pour toutes les gares et points d’arrêt :
- Il existe encore quelques lignes où le train ne circule pas toutes les heures. C’est par exemple le cas, en Région Liégeoise, de la ligne 42 Rivage-Gouvy ou encore la ligne 43 Liège-Marloie les weekends. Le cdH demande à ce qu’au minimum, un train par heure et par sens, circule tous les jours de la semaine.
- En heures de pointe, certaines lignes ne proposent qu’un train par heure. Nous souhaitons qu’au minimum deux trains par heure soient prévus aux heures de pointe en semaine uniquement (6h – 9h et 16h – 19h), avec idéalement un espacement de 30 minutes entre les trains.
- Sur les réseaux urbains comme ceux de Bruxelles, Liège et Charleroi, nous demandons de renforcer l’offre, avec au minimum deux trains par heure et par sens, avec des renforts aux heures de pointe, m’objectif étant d’atteindre 4 trains par heure et par sens toute la journée à l’horizon 2030. Par ailleurs, Namur doit aussi bénéficier d’un réseau suburbain articulé autour de 5 lignes (Andenne-Namur, Jemelle-Ciney-Namur, Bauraing-Dinant-Namur, Tamines-Namur, Gembloux-Namur), avec une offre renforcée, au même titre que les autres villes.
- Sur les lignes principales représentées par la liaison Liège-Tournai (Dorsale Wallonne), l’axe Bruxelles-Luxembourg (Axe 3) ainsi que toutes les lignes entre la Dorsale Wallonne et Bruxelles : Minimum deux trains par heure et par sens avec des renforts pour atteindre 4 trains par heure et par sens aux heures de pointe. Il n’est par exemple pas normal qu’en heure de pointe, un Tournaisien qui se rend à Namur ne dispose que d’un train par heure !
3. Depuis 2014, les amplitudes horaires (heure du premier et du dernier train) ont été restreintes. Il faut au moins rétablir la situation qui prévalait auparavant et augmenter l’amplitude des horaires (premier train/dernier train) de 6h à 22H partout en semaine et de 7h à 23h partout le weekend.
4. Renforcer la ponctualité/fiabilité des lignes en réclamant que des avancées soient opérées par tous les opérateurs concernés. Pour rappel, entre 2012 et 2017, les trains de voyageurs belges ont été dans les moins ponctuels de toute l’Europe (étude PRIME). Même s’il n’y a « que » 12% des trains qui sont en retard de plus de 6 minutes (critère utilisé par la SNCB), à peine un train sur deux enregistre un retard inférieur à une minute !
- Il est indispensable de renforcer la capacité à revenir rapidement à une situation de circulation normale après un incident, limitant au maximum l’effet boule de neige des retards. Cela implique notamment de maintenir les aiguillages et autres composants du réseau permettant de passer d’une voie à l’autre et plus globalement de maintenir une certaine « souplesse d’exploitation » du réseau.
- Il est également nécessaire de doter tant INFRABEL que la SNCB de moyens suffisants pour disposer d’infrastructures et de matériel roulant fiables. Pour rappel, sous l’ancienne législature, le Gouvernement fédéral MR-NVA a réalisé une économie structurelle de 2 milliards d’euros sur le dos de la SNCB et d’INFRABEL.
- La ponctualité passe enfin par la résolution du goulet d’étranglement que représente la jonction « Nord-Midi ». Nous plaidons pour le développement de la rocade (lignes 26 et 28) et d’un REB (réseau express bruxellois) à l’échelle de la métropole bruxelloise qui profite à la fois aux Bruxellois et aux navetteurs. Les gares de Bruxelles-Midi et Bruxelles-Nord pourraient également servir de « terminus » pour certains trains, évitant ainsi le transit par Bruxelles-central. Cela doit toutefois se faire a minima, en tenant compte de la capacité d’accueil des deux gares et en proposant aux usagers concernés une correspondance continue et facilement accessible depuis leur quai.
5. Mettre en place progressivement des noeuds de correspondance pour garantir aux usagers les correspondances entre trains ou entre le train et le bus ou le tram : Actuellement, les horaires des relations IC qui desservent Charleroi, Namur et Liège ne permettent pas des connections attractives avec d’autres lignes. Pour remédier à ces lacunes, le principe de « Noeuds de correspondance » appliqué dans un maximum de gares wallonnes est soutenu. L’objectif est d’accroitre le nombre de destinations accessibles en train. L’utilisateur doit pouvoir changer de train dans un laps de temps raisonnable et fiable. Les correspondances vers les bus doivent également être assurées. Son application plus systématique qu’actuellement nécessite au préalable une vision à long terme – identification des gares-noeuds – qui doit être partagée avec les autres opérateurs de transports régionaux. Une meilleure coordination doit enfin être instaurée entre INFRABEL et la SNCB pour assurer les correspondances, notamment en cas de léger retard. Actuellement, quasiment plus aucune souplesse en matière de départ des trains.
6. Prévoir un matériel roulant adapté nombre d’usagers et à leurs besoins afin d’éviter les trains « bondés » ou les trains « fantômes » : des véhicules plus légers pour les petites lignes et des trains de plus grande capacité sur les lignes très fréquentées. Concrètement, nous souhaitons :
- Un matériel de type « light train » pour les dessertes locales (trains à faible capacité aujourd’hui insuffisant)
- Du matériel bi-courant sur les relations transfrontalières.
- Du matériel équipé de doubles portes et de planchers bas pour en améliorer l’accessibilité à tous, ce qui permettra de fluidifier les entrées/sorties de voyageurs et ainsi de réduire les temps d’attente en gares.
- Rendre le matériel roulant accessible aux PMR et prévoir des espaces pour les vélos et les poussettes.
- Développer le « télétrainvail » : permettre à ceux qui le peuvent de travailler dans le train en assurant une couverture 4G continue (ou à défaut, un wifi à bord) sur toutes les lignes, des prises électriques en nombre suffisant et placées à proximité des voyageurs (pas uniquement des prises pour brancher les aspirateurs du personnel de nettoyage) et tes supports sur lesquels poser un ordinateur.
7. Enfin, améliorer la lisibilité de l’offre et la communication avec les usagers.
- Les technologies actuelles permettent de communiquer en temps réel avec les voyageurs, d’interagir avec eux et de les guider vers les solutions les plus efficaces, même en cas d’incident
- En cas de survenance d’une panne du train ou lorsque deux trains desservant une même ligne partent +/- au même moment en raison d’un retard), les voyageurs doivent être informés et guidés pour choisir le bon train ou changer de train afin d’atteindre leur destination le plus rapidement possible.
- En cas de retard, les usagers doivent également être en mesure d’introduire à partir de leur smartphone une demande invitant la SNCB à assurer la correspondance (et ne plus dépendre uniquement de l’accompagnateur de train). Sur base de cette information, et si le retard n’est pas excessif, l’opérateur doit être en mesure d’y répondre favorablement.