La présente proposition de loi vise à élargir l’analyse d’impact de la réglementation prévue à l’article 5 de la loi du 15 décembre 2013 portant des dispositions diverses concernant la simplification administrative aux effets potentiels de tout avant-projet de réglementation sur les pouvoirs locaux.
L’article 6 de la loi du 15 décembre 2013 portant des dispositions diverses concernant la simplification administrative impose à chaque membre du gouvernement de procéder à une analyse d’impact des avant-projets de loi et des projets d’arrêtés ou ministériels qui relèvent de sa compétence et pour lesquels l’intervention du Conseil des ministres est requise.
Cette analyse d’impact est définie à l’article 5 de cette loi comme “l’évaluation des effets potentiels de tout avant-projet de réglementation sur l’économie, l’environnement, les aspects sociaux et les administrations, préalablement à son adoption par l’autorité politique.”
Il y est ensuite précisé que cette analyse porte sur des objectifs transversaux (à savoir le développement durable, l’égalité des femmes et des hommes et la cohérence des politiques en faveur du développement) et sur des matières déterminées (à savoir les charges administratives et les petites et moyennes entreprises).
C’est sous l’influence de recommandations internationales et conformément à la législation européenne que les analyses d’impact déjà existantes (test Kafka, test EIDD2, test dit genre, test PME et test cohérence des politiques en faveur du développement) ont été intégrées dans une évaluation ex ante harmonisée avec des analyses d’impact relatives à d’autres thèmes. L’objectif de ces analyses d’impact est de permettre au législateur de se rendre compte des conséquences qu’aura une nouvelle réglementation sur des thématiques spécifiques. La présente proposition de loi vise à ajouter les pouvoirs locaux à la liste des matières sur lesquelles devra porter l’analyse d’impact de la réglementation.
Cet ajout est justifié parce que la situation financière des communes se dégrade en raison notamment de décisions prises au niveau fédéral, alors que les pouvoirs locaux sont le niveau de pouvoir le plus proche du citoyen et sont de loin les premiers investisseurs publics de notre Royaume.
Les exemples de décisions prises par le gouvernement fédéral et ayant eu un impact sur les pouvoirs locaux sont légion: zones de secours, zone de police, fonds de pension solidarisé, gestion de la crise COVID-19. CPAS…
Nous pouvons ainsi citer les impacts des Tax Shift I et II, dont le coût annuel pour les communes du pays a été évalué par le SPF Finances à près de 325 millions d’euros depuis 2021.
Nous pouvons également mettre en évidence la loi du 24 octobre 2011 assurant un financement pérenne des pensions des membres du personnel nommé à titre définitif des administrations provinciales et locales et des zones de police locale et modifiant la loi du 6 mai 2002 portant création du fonds des pensions de la police intégrée et portant des dispositions particulières en matière de sécurité sociale et contenant diverses dispositions modificatives. Cette loi a instauré un nouveau modèle de pension pour les administrations locales, qui prit effet le 1er janvier 2012.
La réforme repose sur la création d’un seul “Fonds de Pension Solidarisé” et sur un mécanisme de doubles cotisations (base et responsabilisation) qui doit permettre de couvrir chaque année intégralement les dépenses de pensions sans avoir de déficit annuel. Selon les projections du Service fédéral des Pensions réalisées en 2019, la cotisation de responsabilisation (qui s’ajoute aux cotisations de base, elles-mêmes déjà majorées) à charge de l’ensemble des communes, provinces et CPAS wallons devrait passer de 128 millions d’euros en 2019 à plus de 350 millions d’euros en 2025.
Selon l’Union des Villes et Communes de Wallonie, pour 2022, les surcoûts liés à des décisions prises à d’autres niveaux de pouvoir sont estimés à 327,1 millions d’euros. C’est considérable. De plus, ils sont en hausse constante depuis de nombreuses années: on n’en était qu’à 293,5 millions en 2018. Pour les prochaines années, les estimations de l’Union des Villes et Communes de Wallonie restent pessimistes: 360,8 millions en 2023 et 355,2 millions à l’horizon 2024. À l’aube d’un projet de réforme fiscale qui devrait comprendre une réforme de l’IPP, l’ensemble des pouvoirs locaux (Brulocalis, UVCW et le VVSG) s’inquiètent des impacts sur les communes qu’auront les décisions du gouvernement fédéral.
En imposant une analyse d’impact de la réglementation sur les pouvoirs locaux, la présente proposition de loi doit permettre au gouvernement et au législateur d’avoir une meilleure conscience de l’impact sur les communes de chaque projet de réglementation et permettre aux communes d’être mieux informées des impacts qu’elles subiraient en cas d’adoption de textes réglementaires ou législatifs les impactant.