Vanessa Matz (cdH): Madame la présidente, je vous avoue que je suis heureuse.
Mme De Wit avait l’air de dire, tout à l’heure, qu’en commission, tout le monde était heureux – ça n’arrive pas souvent et dès lors on peut le dire, concernant un projet très important. Le choc avait été, pour nous, assez fort lorsque nous avons lu l’ancienne mouture des articles 128 et 131. Un choc, une incompréhension aussi, face à ce qui nous apparaissait comme un véritable camouflet à la Cour européenne des droits de l’homme, concernant le traitement des personnes internées.
Il s’agissait dans l’ancienne formule du projet de loi, ni plus ni moins que de rendre légal l’illégal, de rendre légal l’inhumain, l’enfermement de personnes souffrant de troubles mentaux en prison.
Oui, très vite, nous avons déposé des amendements en vue de modifier ces points. Ces amendements ont été rejetés une première fois en commission. S’en sont suivis une série d’avis de la société civile, avis contre le texte et émanant d’Avocats.be, de l’Observatoire international des prisons, de l’OVB, de l’association syndicale des magistrats et d’autres encore. Il y a eu un deuxième passage en commission. Ces amendements ont à nouveau été rejetés. Une fois la séance plénière venue, voici un peu plus de deux semaines, nous avons à nouveau déposé ces amendements et nous avons sollicité un avis du Conseil d’État, soutenus en cela par d’autres partis de la minorité, que je remercie.
Certains, quand on envoie au Conseil d’État, parlent de technique dilatoire ou de flibuste parlementaire. Mais ici, reconnaissons que cette période a été mise à profit par la majorité pour réfléchir à cette illégalité consacrée dans la loi.
Aujourd’hui, nous sommes cosignataires de deux amendements avec la majorité, et je me réjouis vraiment du travail qu’il a été possible d’effectuer ensemble. Avec ces amendements, nous faisons évidemment un pas dans la bonne direction.
Malgré cela, comme le Conseil d’État le mentionnait dans son avis, il est porté atteinte aux droits fondamentaux par l’insuffisance de places disponibles pour les internements. Il vous appartient, vous le savez monsieur le ministre, d’y remédier. Les centres de psychiatrie légale de Wavre, Alost et Paifve ne seront pas disponibles avant 2026. Avec un nombre d’internements en augmentation, il est important de travailler dès aujourd’hui à trouver des solutions alternatives au placement des malades mentaux en prison. Il avait notamment été question que des hôpitaux mettent à disposition des lits pour les internés. À notre connaissance toutefois, aucun accord financier n’a jamais été conclu. Cela pourrait constituer une piste de solution intéressante.
L’autre partie de ce projet qui a déboulé – excusez-moi l’expression – un peu tard en commission, c’est l’exécution des petites peines.
On ne peut évidemment que valider le report qui a été proposé. Il répond aux demandes du terrain.
Au sein des prisons, le personnel pénitentiaire était légitimement extrêmement inquiet face au risque de voir arriver toutes ces personnes dans des établissements qui sont déjà surpeuplés.
Alors que vous prévoyez finalement de faire entrer en vigueur l’exécution des courtes peines, on comprend mal comment cela pourrait être le cas sans une réforme encore plus profonde du monde carcéral que celle qui est envisagée.
Il reste aussi au sein de ce projet 24 chapitres d’importance variable qui relèvent davantage des dispositions diverses que d’un grand bouleversement législatif, tel que le titre pourrait le laisser croire. Vous savez que nous avons eu de nombreuses discussions sur ce titre Une justice plus humaine, plus rapide et plus ferme. Plus humaine, elle ne l’était pas avec les dispositions sur l’enfermement des internés. Disons que maintenant, on peut considérer que c’est plus humain. Plus rapide et plus ferme, je vous ai dit, monsieur le ministre – mais j’ai accepté de retirer mon amendement sur ce point -, qu’il s’agissait plutôt d’un slogan que la concrétisation de ces différents adjectifs.
Mais il faut être de bon compte et je le serai. Je salue aussi le positif de cette loi. Je pense, par exemple, à l’extension des pouvoirs du juge de paix afin de mieux accompagner les personnes à protéger ou à l’augmentation de l’aide financière d’urgence pour les victimes d’actes de violence.
Vous l’aurez compris, nous voterons pour ce projet de loi, en espérant qu’il sera encore possible à l’avenir de collaborer à partir d’une opposition constructive, comme ce fut le cas ici.
Je pense tout particulièrement à un dossier qui nous occupe pour l’instant, à savoir le droit pénal sexuel, à propos duquel nous avons déposé beaucoup d’amendements, dont certains ont suscité chez vous une certaine ouverture. Nous en attendrons les résultats. Nous serons toujours prêts à avancer pour défendre une justice véritablement plus humaine.
Pour terminer, ceux qui siègent en commission avec moi savent que j’apprécie les petites citations. La suivante me semble particulièrement adéquate dans le dossier qui nous occupe. Vous la connaissez: « Point n’est besoin d’espérer pour entreprendre ni de réussir pour persévérer. » Je vous remercie de votre attention.