Vanessa Matz (Les Engagés): Monsieur le ministre, je tiens à saluer plusieurs aspects de ce projet de loi. Tout d’abord, globalement dans le texte, on évacue les termes de « malade mental » pour parler de « personne atteinte d’un trouble psychiatrique ». Même si cela peut paraître sémantique, je pense que c’est beaucoup plus respectueux, moins stigmatisant et beaucoup plus actuel. On peut également saluer que le projet définisse le trouble psychiatrique. Il y a eu des discussions très intéressantes lors des auditions, notamment sur la question des addictions. Vous m’avez confirmé, monsieur le ministre, que les addictions pourraient être, le cas échéant, bien comprises dans ce projet, ce qui est évidemment très important.
Outre la définition du trouble psychiatrique, d’autres points positifs sont les objectifs de réduire les traumatismes et de privilégier les solutions alternatives volontaires, ou encore la période d’évaluation clinique de 48 heures qui représente une réelle opportunité de meilleure prise en charge plus sûre sur le terrain.
Un autre élément positif réside dans la méthode et le trajet de ce projet de loi. Je constate que dans de nombreux amendements qui ont été adoptés, il a été tenu compte des auditions. Cela devait être une évidence, mais cela n’a pas toujours coulé de source et l’on peut donc se réjouir de voir des adaptations pour tenir compte des auditions, des demandes de clarification de l’OVB et surtout des différents points soulevés par l’Union royale des juges de paix et de police. Sur le fond, même si le processus a pu être long, nous allons adopter un projet conçu sur la base d’un rapport d’un groupe de travail. Les experts se sont rencontrés à plusieurs reprises sous différentes législatures pour mener une réflexion sur les améliorations nécessaires. Ce travail a pu être traduit dans le présent texte.
Malheureusement, malgré les amendements, le projet ne parvient pas à répondre à la critique fondamentale qui lui est adressée, à savoir celle que nous formulons, même si nous ne sommes pas les seuls. C’est en effet aussi le signal envoyé par l’Union royale des juges de paix et de police et l’Association flamande de psychiatrie. Selon cette critique, même avec le texte actuel, on pourrait en faire beaucoup plus si des moyens supplémentaires étaient accordés. Il s’agit surtout de libérer les moyens humains et financiers nécessaires à l’encadrement du personnel, précisément pour éviter des décès tels que celui de Jozef Chovanec.
Nous devons aller plus loin que ce projet de loi afin de soulager et de trouver des alternatives pour les services d’urgence qui ne sont pas toujours outillés face à des patients souffrant de syndrome de délire agité ou de symptômes de confusion aiguë. Il faudrait repenser l’accueil de ces personnes. Une partie de la solution se trouve dans l’ouverture d’unités spécialisées. Il ne suffit pas qu’une loi soit bien conçue, encore faut-il qu’elle puisse être appliquée. Malheureusement, le nouveau texte ne résoudra pas le problème posé par le manque criant de lits disponibles, de médecins psychiatres, de greffiers et de juges de paix pour faire appliquer cette législation.
Nous voterons favorablement ce texte, qui constitue un bel outil. Mais surtout, vous pouvez compter sur nous pour poursuivre le travail en vue d’une justice centrale et pleinement valorisée, en particulier au niveau de ses moyens humains.
Paul Van Tigchelt, ministre: Madame Matz, je vous remercie pour vos remarques. Il me semble qu’en commission, vous aviez déjà émis ces critiques concernant les moyens. Vu que les nouvelles dispositions sont importantes, il faut aussi disposer des moyens nécessaires. Avoir des soins adaptés pour les malades ne relève pas uniquement de la Justice.
Quatre éléments sont importants en termes de capacité: la répartition des hôpitaux actuellement autorisés, l’intégration et l’alignement de l’offre plus large en matière de crise de santé mentale sur la nouvelle loi, l’intégration et l’alignement de l’offre de crise élargie avec entre autres les pouvoirs inclus par les États et des investissements supplémentaires encore cette année. Ce sont là quelques éléments. Pour nous, cette loi, qui suit les avis d’un groupe de travail, est un pas dans la bonne direction. Nous tenons également compte des drames que nous avons vécus dans ce pays et qui concernaient des personnes présentant des troubles psychiques. Si je ne me trompe, il y a encore un amendement.
Vanessa Matz (Les Engagés): J’aimerais répéter qu’en matière de justice, tout au long de cette législature, nous avons eu des textes qui, sur papier, sont bons voire très bons, mais le problème réside toujours dans l’absence de moyens nécessaires pour les accompagner. Ils restent alors lettre morte.
Prenons par exemple le Code pénal, sur lequel nous avons longuement travaillé. Le Code pénal contient beaucoup de bonnes choses mais, demain, concrètement, comment allons-nous mettre en œuvre les principes qu’il édicte, notamment sur la question des prisons, compte tenu de la surpopulation carcérale, ou la question des courtes peines, que nous avons votée précédemment? Bien sûr, il faut que les peines soient exécutées, mais il n’est pas possible de les faire exécuter correctement pour l’instant.
En l’occurrence, c’est en quelque sorte ce même sentiment qui préside pour ce projet de loi. Les principes sont bons et étaient attendus, compte tenu des drames qu’a connus notre pays, mais à défaut de moyens pour faire appliquer ces procédures, nous revivrons malheureusement d’autres drames. Nous reprochons à cette majorité de parfois se cacher derrière des textes édictant de bons principes, mais avoir des principes n’est pas tout, il faut pouvoir les mettre en œuvre.