Vanessa Matz (Les Engagés): Madame la présidente, monsieur le ministre, nous le savons tous, la prison devrait être le remède ultime pour sanctionner les personnes délinquantes. La récidive est énorme en Belgique et le système carcéral y est pour beaucoup.
Vous avez dit être favorable au développement de peines alternatives et, dans le même temps, vous souhaitez exécuter toutes les courtes peines. Une sanction doit être exécutée, c’est bien clair, mais de quelles sanctions parlons-nous? De ces sanctions qui amènent inévitablement à la récidive puisque la prison ne guérit pas, bien au contraire, ou de ces peines de prison qui pourraient être transformées en peines constructives pour la personne condamnée et pour la société en général.
La presse relatait les montants astronomiques qui sont alloués pour chaque personne détenue et les cacahuètes – excusez-moi l’expression – allouées aux peines alternatives. Que les prisons doivent absolument être refinancées, c’est une évidence, mais ne faut-il pas mettre aussi les moyens pour des méthodes alternatives dont les scientifiques affirment depuis longtemps qu’elles pourraient diminuer drastiquement le taux de récidive? La réforme du Code pénal devrait ainsi aller dans ce sens pour amorcer un changement d’application de la loi pénale.
Monsieur le ministre,
- Quelle est votre analyse de la situation?
- Quelles sont vos perspectives en matière de financement des sanctions alternatives? Ne faut-il pas une aide du fédéral aux entités fédérées pour améliorer ces perspectives et faire fonctionner ces méthodes?
- Votre réforme du Code pénal va-t-elle résolument dans ce sens?
Je me permets d’illustrer mon propos par un exemple. J’ai visité hier un refuge pour animaux où des personnes exécutant une peine alternative sont régulièrement employées. Les responsables de ce refuge me rappelaient toute l’importance de continuer. Vraisemblablement, cela se passe très bien tant pour les personnes effectuant une peine alternative que pour le refuge pour qui leur travail est appréciable dans des temps qui sont difficiles pour toutes les associations. Ils me rappelaient donc l’importance de ce système et de son financement pour pouvoir continuer à leur envoyer des personnes.
Vincent Van Quickenborne, ministre: Madame la présidente, chère collègue, l’article auquel vous faites référence est lié aux 25 ans de l’ASBL Arpège-Prélude qui dispense des formations dans le cadre des subsides gérés par les Communautés.
Lors de la sixième réforme de l’État, une partie des montants liés à ces subsides a ont été transférée au budget de ces Communautés. C’est le cas des subsides versés à cette ASBL. Certains de ces budgets sont restés au sein du budget fédéral et sont versés notamment pour les projets de peine de travail, de formation, de thérapie et ce, sur la base des décisions prises par les Communautés au sein de la Conférence interministérielle Maisons de justice.
Depuis cette sixième réforme, ce sont donc les Communautés qui sont en charge du suivi et de l’encadrement de ces mesures alternatives. C’est donc vers elles que devrait se diriger votre question.
Cela étant, sur le fond, je dois souligner que j’ai toujours soutenu que la prison devait être le remède ultime et que d’autres options devaient être prises avant d’en arriver à prononcer une peine d’emprisonnement. C’est la raison pour laquelle je défends ardemment les initiatives que l’approche M, la politique de réaction immédiate – apparemment, cela s’appelle du tac au tac –, ou encore les champs de réparation, autant d’exemples de peines alternatives. En matière de roulage, je suis également favorable à l’utilisation de mesures alternatives.
En effet, les chiffres montrent que celles-ci sont beaucoup plus efficaces. Ainsi, les récidives ont chuté de 41 % après que les conducteurs condamnés pour une infraction au Code de la route ont dû suivre un programme d’apprentissage obligatoire au VIAS. Mais c’est surtout la réforme du Code pénal, dont on a déjà parlé aujourd’hui, qui va véritablement apporter une révolution copernicienne pour donner un nouveau sens aux peines.
En attendant, je vous rappelle que des montants énormes sont investis par ce gouvernement en recrutement de personnel pour les prisons et leur nouvelle fonction d’accompagnateurs de détention, mais également pour la mise en place des maisons de détention qui permettront également de lancer l’initiative des détentions à petite échelle, dont tous les acteurs s’accordent à dire que c’est une excellente initiative. Ce n’est pas une peine alternative. Mais l’effet est le même. C’est la raison pour laquelle, croyez-moi, les montants évoqués sont loin d’être des cacahuètes.
Je suis aussi convaincu que si le juge prononce une peine de prison, celle-ci doit être exécutée.
Vanessa Matz (Les Engagés): Monsieur le ministre, je vous remercie pour votre réponse. Si je comprends bien, il n’y a plus aucun financement fédéral concernant les peines alternatives. En raison de la réforme de l’État, l’ensemble des moyens pour organiser ces peines alternatives vont vers les maisons de justice et donc vers les Communautés. Il me semblait qu’il restait des budgets fédéraux pour financer les peines alternatives.
Vincent Van Quickenborne, ministre: Je peux vous fournir le détail par écrit. Il n’y a pas de problème. Certains budgets restés au sein du budget fédéral sont versés pour assurer des projets de peines de travail et de formation, basés sur des décisions prises par les Communautés et ce, en Conférence interministérielle.
Vanessa Matz (Les Engagés): Et vous avez les montants? Ce serait bien de nous les envoyer!
Vincent Van Quickenborne, ministre: Absolument!
Vanessa Matz (Les Engagés): Il y a le volet prison, sur lequel vous augmentez le budget pour créer au sein de la prison, une forme de parcours de détention. On s’en réjouit, mais aucun budget complémentaire n’est prévu à destination des entités fédérées pour organiser des peines alternatives.
Si vous pouviez me transmettre les chiffres demandés, ce serait bien. Parce que j’entends aussi votre volonté de dire qu’en matière de roulage, vous constatez qu’une peine alternative a plus d’effets qu’une peine de prison.
Évidemment, il ne s’agit pas de contester la légitimité d’une peine – ce n’est pas mon propos –, mais plutôt de réfléchir à une solution plus efficace et moins onéreuse qu’une place en prison.