Vanessa Matz (Les Engagés): Monsieur le ministre, il nous revient que vous avez décidé de diminuer le budget nourriture et hygiène à destination des détenus. Selon les informations que nous avons reçues, en 2022, le budget 2023 indiqué aux établissements pénitentiaires était de 4,66 euros par détenu par jour pour la nourriture et 0,45 euro pour l’entretien (frais d’hygiène). En juillet 2023, le budget augmente: 5,18 euros pour la nourriture et 0,50 euro pour l’entretien. On pouvait saluer cette augmentation substantielle. Mais voilà que fin décembre 2023, le budget aurait été diminué à 4,92 euros pour la nourriture et à 0,40 euro pour l’entretien.
Cette situation est difficile à comprendre, alors que le prix des matières premières ne cesse d’augmenter. Par ailleurs, avec l’augmentation du nombre de détenus à 12 000 – un record! – et le manque de personnel, on sait que la situation est particulièrement explosive. Il ne faudrait pas que d’éventuelles carences viennent encore exacerber ces tensions.
Dans un écrit d’octobre, le comité de pilotage des Journées nationales de la prison, qui regroupe une série d’associations actives dans le milieu pénitentiaire, estimait que le budget quotidien alloué à l’alimentation de la personne détenue ne permet pas de proposer de la nourriture
variée, en quantité suffisante et de couvrir tous les apports nutritifs nécessaires.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous confirmer ces chiffres et cette diminution? Quelles en sont les causes? Ne pensez-vous pas que cela risque de fragiliser un peu plus les institutions pénitentiaires? Je ne dois pas vous rappeler que notre pays vient encore de vivre une grève des gardiens de prison où la surpopulation ainsi que les conditions de vie des détenus et les conditions de travail des agents ont été dénoncées.
Disposez-vous d’informations quant à la quantité et la qualité des repas proposés dans les prisons? Dispose-t-on d’informations pour savoir si les apports nutritifs fondamentaux sont respectés?
Paul Van Tigchelt, ministre: Madame Matz, nous le constatons tous, les prix de l’alimentation varient fortement et tout particulièrement ces dernières années. Cela a un impact sur tous les ménages. Mais lorsque les personnes concernées par ces augmentations et ces diminutions de prix sont plus de 12 000, comme c’est le cas des détenus, chaque variation peut avoir des répercussions importantes. Il faut alors être prudents et éviter d’être dispendieux.
Dans cette optique, les budgets ont effectivement été augmentés au cours de l’année 2023. Un budget de 5,68 euros par détenu et par jour avait alors été prévu, soit 5,18 euros pour la nourriture et 0,50 euro pour l’entretien. En 2024, le budget initial prévoit actuellement un budget de 5,32 euros par détenu et par jour, c’est-à-dire 4,92 euros pour la nourriture et 0,40 euro pour l’entretien. Il s’agit là d’une estimation initiale qui pourrait être revue en fonction des prix constatés et de la population journalière moyenne.
Cela étant, en ce qui concerne la quantité, la qualité et la valeur nutritionnelle, je peux dire ce qui suit: nos spécifications tiennent compte de la réglementation applicable aux produits à fournir, y compris le respect des normes. En outre, dans ce contexte, je peux vous inviter à vous référer à une question de Mme Rohonyi posée en commission en juillet 2021, qui abordait déjà ce sujet. Cette réponse précise que la plupart des établissements pénitentiaires sont localement responsables de la composition équilibrée des repas sur la base des produits individuels. Il n’existe pas de données spécifiques sur les valeurs nutritionnelles. En ce qui concerne les contrats de catering, il existe toutefois des accords stipulant qu’il s’agit de repas entièrement préparé
Vanessa Matz (Les Engagés): Monsieur le ministre, c’est donc bien ce que je dis. Il y a effectivement une diminution du montant alloué par détenu à la nourriture et à l’hygiène. Vous dites que cela a augmenté. Oui, justement! Comment fait-on concrètement pour faire plus avec moins? C’est en fait cela que vous proposez pour la nourriture. Vous travaillez probablement à budget constant. Il y a plus de détenus. Cela coûte plus cher. Et donc, tout le monde est diminué. Ne serait-il pas plus juste d’augmenter la dotation totale réservée aux repas et à l’hygiène?
Si on diminue, on diminue forcément quelque chose. On diminue les quantités ou la qualité. Avec le prix de la nourriture en fluctuation plutôt à la hausse – vous l’avez d’ailleurs dit dans votre réponse –, on ne peut imaginer que, pour chaque détenu, les portions ne soient pas réduites, ce qui est évidemment de nature à exacerber un certain nombre de tensions déjà très présentes en raison de la surpopulation. Je ne comprends donc pas pourquoi on n’a pas tout simplement augmenté les budgets en prévision de cette augmentation car, pour tout le monde, il revient plus cher de faire ses courses, aussi pour les citoyens. Je vous avoue que je ne comprends pas. Comme il y a plus de détenus, cela coûte plus cher mais on donne moins.