Entourée de ses deux gros terre-neuve noirs, Vanessa Matz, députée fédérale des Engagés, est très active et siège à la table des négociations de l’Arizona. « Tous les gens qui ont des chiens savent le bonheur que cela procure. » Liégeoise, maman de trois enfants, qui a longtemps travaillé avec Joëlle Milquet et aujourd’hui avec Maxime Prévot, se confie.
Une thématique vous tient à cœur…
« Dans le cadre du futur Code pénal, j’ai déposé un texte visant à créer l’infraction d’homicide routier. Pour certains conducteurs, il y a un caractère quasi volontaire au fait de se dire Oui, je peux effectivement aller tuer quelqu’un. Le nouveau Code pénal prévoit d’éradiquer la prévention d’homicide involontaire par défaut de prévoyance et de précaution en matière routière. Le drame de Strépy en mars 2022 (6 morts et 39 blessés, ndlr) a frappé les esprits. Le nouveau code parle donc plutôt d’accident de roulage mortel. Aucun des deux termes ne convient. Par ailleurs, je demande pour l’homicide routier une peine de niveau 4, c’est-à-dire de cinq ans à dix ans de prison. L’alcool et les drogues ou la vitesse excessive en sont bien souvent la cause. Concernant les neuf premiers mois de l’année 2023, 3 027 accidents impliquant un conducteur sous influence ont été enregistrés. »Qu’est-ce que cela va changer ?
« Ces termes invitent à une meilleure prise de conscience des auteurs, ou auteurs potentiels, et des conséquences de leurs agissements irresponsables. J’avais été terriblement interpellée par l’actualité en France avec l’affaire Pierre Palmade. Sous le précédent gouvernement, le ministre de la Justice de la Vivaldi n’avait pas retenu mes propositions d’amendement. Depuis septembre, les parents de Romane, fauchée à Bruxelles en trottinette lors d’une soirée, m’ont contactée. Ils ont réalisé une pétition, ils ont écrit à tous les présidents de l’Arizona, à tous les négociateurs. J’ai redéposé une proposition de loi. Dans ma vie, j’ai déposé beaucoup de textes sur des sujets de société mais je n’ai jamais reçu autant de mails. »
Vous voulez aussi réduire la fracture numérique ?
« Le nombre de Belges exposés au risque d’exclusion numérique est passé de 40 % en 2019 à 46 % en 2021. Nous sommes favorables à une digitalisation avec une alternative non numérique pour celles et ceux qui en ont besoin, et ce, sans surcoût. »
Pourquoi est-ce important pour vous ?
« Ce type de problématique non résolue participe à la montée des extrêmes. Les gens se sentent abandonnés. Ils en ont assez. J’ai donc déposé un texte au niveau fédéral. J’insiste sur une accessibilité à une alternative non numérique. Pour moi, il est aussi important de faire disparaître ce sentiment de culpabilité. »
Lundi, mardi, grève des enseignants ? Qu’en pensez-vous ?
« Je comprends les inquiétudes. Je pense qu’il y a vraiment un effort pédagogique à faire : pour la question du statut, il faut rappeler qu’il s’agit d’une mesure positive qui garantit plus de sécurité. Même chose pour le qualifiant. Par contre, pour ce dernier aspect, il faudra réfléchir un moment : Est-ce qu’on a pris la bonne voie ? Il y a peut-être pas analysé tous les paramètres et il faut peut-être réajuster à la marge. »
Chaque jour, vous vous battez et, en même temps, vous souffrez d’une maladie. Que pouvez-vous en dire ?
« Je souffre depuis huit ans d’une maladie rare qui provoque des douleurs indescriptibles à la tête, souvent nocturnes, et qui peuvent survenir plusieurs fois par jour ou par nuit et durer deux heures. Nous sommes quelques milliers en Belgique à en souffrir. Je pense à eux. Pour beaucoup, la maladie est invalidante. Je lis leur témoignage sur la page Facebook de l’association OUCH Belgium « Algie Vasculaire de la Face ». Il n’existe pas de remède. »
Quelle souffrance au quotidien, sans indiscrétion ?
« Neuf fois sur dix, c’est la nuit. La littérature médicale recense la douleur comme la plus forte que le corps humain connaisse. C’est l’équivalent d’une jambe coupée à vif chaque fois que j’ai une crise. Cette nuit, par exemple, c’était à 4 h du matin. Les deux dernières législatures, je pense avoir manqué, à cause de cela, deux fois une demi-journée. Un grand médecin à Paris m’a dit : Vous ne pourrez plus travailler. J’essaie de faire de cette maladie une force. J’ai la chance d’avoir une famille autour de moi et je pense souvent à d’autres malades qui sont seuls quand ils souffrent. »
« Je veux créer une période de deuil »
« J’ai en effet déposé une proposition de loi pour mettre en place un congé spécifique en cas de fausse-couche. Dans un tel moment, la femme, le couple, peuvent avoir besoin d’effectuer une période de deuil et d’avoir une certaine liberté dans le choix du moment de cette période. Toutefois, je précise que ce congé spécifique ne doit pas être une obligation. J’ai été interpellée par de nombreuses familles, etc. Actuellement, le système de petit chômage permet aux travailleurs de s’absenter pour des événements familiaux tels qu’un mariage ou un décès, tout en conservant leur rémunération. Cette proposition vise à étendre ce droit aux parents confrontés à une fausse couche, en harmonisant les droits des travailleurs du secteur privé avec ceux des fonctionnaires fédéraux. »
Que proposez-vous ?
« Un congé de trois jours. Mais cela pourrait être deux ou quatre. Je veux ouvrir le débat. Le Conseil national du Travail réfléchit aux nombreux congés thématiques. Ce congé doit faire partie de la réflexion globale. Beaucoup d’avis ont été demandés, notamment des associations féminines, mais aussi d’organisations professionnelles. »
Cela va-t-il concerner beaucoup de femmes ?
« Environ 10 % des femmes enceintes sont concernées par une fausse couche. Le risque est plus élevé dans les premières semaines de grossesse et dépend de l’âge de la femme : 12 % avant 20 ans, et près de 26 % après 40 ans. Cette mesure vise à offrir un cadre adapté aux besoins des parents en deuil, tout en reconnaissant la douleur et le traumatisme qu’entraîne une fausse couche. Le choix laissé aux parents de prendre ou non ce congé reflète une approche respectueuse des différentes manières de surmonter cette épreuve. »
Par V.Li. Publié le 26/01/2025 à 06:00